Les « Indésirables », une conférence de Georges Sentis

Le 5 février 2023, lors de l’A.G. de MER47, Georges Sentis, docteur en histoire et président de l’ANACR des Pyrénées-Orientales, a donné une conférence dont le sujet concerne le traitement des indésirables par les autorités françaises depuis le début du Second Empire jusqu’en 1944. Cette belle conférence, instructive, très détaillée, a captivé le nombreux public grâce à l’enthousiasme communicatif de l’orateur. Nous vous la présentons en suivant le découpage de l’auteur.

Appel à témoigner

Dans le cadre de sa recherche sur les déportations d’indésirables vers l’Algérie, menée par la France d’avant 1945, Georges Sentis lance un appel à toutes les personnes dont un membre de leur famille a eu à souffrir de cet état de fait. G. Sentis relève que, si pour les Français, l’dentification de ces déportés est relativement bien documentée ; par exemple en Lot-et-Garonne, 4 individus ont été déportés en Algérie, pour les Espagnols présents sur le territoire français, le recensement est pratiquement inexistant. Le deuxième volet de son appel concerne le 80e anniversaire de la Libération de la France : quel est le sort des FFI, toutes origines confondues dont des Espagnols, au moment de leur intégration dans la 1re Armée française, et sur le front de l’ Atlantique ? En outre, G. Sentis indique qu’il recherche des informations sur l’aide apportée à l’Espagne Républicaine dès 1934, y compris l’accueil en France des Républicains pourchassés en Espagne au moment du Bieno negro, et sous la dictature franquiste jusqu’aux années 1980.

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Des origines de l’ostracisation des apatrides jusqu’aux débuts du régime de Vichy

Depuis le milieu du XIXe siècle, la France utilise ses possessions coloniales pour se débarrasser de ses opposants politiques les plus en pointe dans la contestation. G. Sentis évoque « les racines profondes de la xénophobie et de l’antisémitisme » pour expliquer le traitement infligé par la France aux « indésirables ». Il met en exergue le défaut de reconnaissance de la France à l’égard des étrangers, venus de toute l’Europe, pour l’aider à se reconstruire et à se développer. Face à cette injuste situation, la classe ouvrière est amenée à construire des ponts entre la main d’œuvre française et immigrée. Le libéralisme de la classe politique dirigeante d’avant 1940, sous la pression des milieux financiers et conservateurs conduit à la promulgation de la loi Daladier de 1938 qui stipule qu’en cas de guerre :

  • Les étrangers seront contraints de s’enrôler dans la Légion Étrangère ou chez les Prestataires de Main-d’œuvre Étrangère (PME – ancêtres des Compagnies de Travailleurs Étrangers ou CTE). Les Brigadistes Internationaux de la Guerre d’Espagne et les Espagnols de la Retirada seront les premiers frappés par cette loi ;
  • Les apatrides seront regroupés dans des centres de séjour surveillé ; en 1939, le ministre de l’Intérieur Albert Sarraut les dénommera « Camps de concentration ».

La déportation en Algérie

Deux groupes constituent le contingent des déportés :

  • Les députés communistes ;
  • Les indésirables français et étrangers.

L’identification des indésirables déportés est difficile à établir puisqu’il n’existe pratiquement pas de listes nominatives. Le départ vers la colonie d’Afrique du Nord s’effectue à partir des quais de Port-Vendres, du fait de la proximité des camps où sont enfermés les hommes et que ce port est le plus près des côtes algériennes.

Dans les camps algériens

En Algérie, les indésirables sont internés sur le haut plateau situé en bordure du Sahara, comme à Djelfa. En l’absence de moyens d’hébergement, les prisonniers doivent construire des baraques dans des conditions climatiques insupportables. Quelques intellectuels laissent des traces écrites. Elles décrivent les dures conditions de la vie dans ces camps, tel Max Aub qui a écrit d’émouvants poèmes, ou encore le philosophe Roger Garaudy.

Pour en savoir plus

La libération

Après le débarquement anglo-américain de novembre 1942, il faut attendre le mois de mai 1943, pour voir les camps se vider. Globalement, toux les indésirables qui peuvent revenir en France poursuivent leur combat contre l’occupant et les collaborateurs de Vichy. Les Indésirables espagnols et ceux d’autres nationalités, parce que formés au combat au cours de la Guerre d’Espagne, sont très recherchés par les Alliés. En particulier, les Espagnols qui vont rejoindre les Forces Françaises Libres (FFL). Parmi eux, ceux de la Nueve qui vont s’illustrer sur les champs de bataille pour la libération de l’Europe, notamment en Normandie, à Paris, en Alsace et jusqu’en Bavière, avec la prise du « nid d’aigle » de Hitler, tout un symbole.

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